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Poètes et résistants
5 mai 2013

Louis Aragon poète de la résistance à l'occupation nazie : L'Art poétique, Paris et La Légende de Gabriel Péri.

A Paris, le 30 mai 1942, Jacques Decour, Georges Politzer, Jacques Solomon et Georges Dudach sont fusillés!

Le 16 août 1942, dans l'hebdomadaire suisse "Curieux", que l'on pouvait recevoir en zone sud, Aragon publie sous son nom " L'Art poétique" qui figurera en tête de "En français dans le texte"  que Fred Uhler va éditer dana ls collection des "Idées poétiques" à Neuchâtel.

 

ART POETIQUE

 

Pour ms amis morts en Mai

Et pour eux seuls désormais

 

Que mes rimes aient le charme

Qu'ont les larmes sur les armes

 

Et que pour tous les vivants

Qui changent avec le vent

 

S'y aiguise au nom des morts

L'arme blanche des remords

 

Mots mariés mots meurtris

Rimes où le crime crie

 

Elles font au fond du drame

Le double bruit d'eau des rames

 

Banales comme la pluie

Comme une vitre qui luit

 

Comme un miroir au passage

La fleur qui meurt au corsage

 

L'enfant qui joue au cerceau

La lune dans le ruisseau

 

Le vétiver dans l'armoire

Un parfum pour la mémoire

 

Rimes rimes où je sens

La rouge chaleur du sang

 

Rappelez-nous que nous sommes

Féroces comme des hommes

 

Et quand notre coeur faiblit

Réveillez-nous de l'oubli

 

Rallumez la lampe éteinte

Que les verres vides tintent

 

Je chante toujours parmi

Les morts en Mai mes amis.

Louis Aragon 1942

 

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PARIS

 

Où fait-il bon même au coeur de l’orage

Où fait-il clair même au coeur de la nuit

L’air est alcool et le malheur courage

Carreaux cassés l’espoir encore y luit

Et les chansons montent des murs détruits

 

Jamais éteint renaissant de la braise

Perpétuel brûlot de la patrie

Du Point-du-Jour jusqu’au Père-Lachaise

Ce doux rosier au mois d’août refleuri

Gens de partout c’est le sang de Paris

 

Rien n’a l’éclat de Paris dans la poudre

Rien n’est si pur que son front d’insurgé

Rien n’est ni fort ni le feu ni la foudre

Que mon Paris défiant les dangers

Rien n’est si beau que ce Paris que j’ai

 

Rien ne m’a fait jamais battre le cœur

Rien ne m’a fait ainsi rire et pleurer

Comme ce cri de mon peuple vainqueur

Rien n’est si grand qu’un linceul déchiré

Paris Paris soi-même libéré

 

Louis Aragon, 1944

Poème classé dans Chaos, Guerre, Louis Aragon.

 

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 Mort pour des « lendemains qui chantent »

Quelles que soient les responsabilités de la direction du PCF et les tentatives du ministre de Vichy, Péri est transféré à la prison du Cherche-Midi, placée sous contrôle allemand. Considéré comme otage par les Allemands qui entendent répondre aux attentats individuels que mène le PCF depuis l’entrée en guerre de l'URSS, Péri fait donc partie des 92 otages fusillés le 15 décembre  1941 au Mont-Valérien.

Le numéro 142 de L'Humanité clandestine, daté du 19 décembre 1941, titre « Von Stulpnagel a fait fusiller 100 patriotes de plus » et poursuit, « Gabriel Péri a été enlevé de la Santé ; qu'en a t'on fait ? Contre ces crimes qui nous ramènent au Moyen Âge, peuple de France lève toi [...][24] » Le numéro 144, daté du 5 janvier 1942 (tiré selon le groupe Unir à 150 000 exemplaires), annonce en première page :

« Gabriel Péri, Sampaix et des dizaines d'autres patriotes ont été fusillés. La France entière doit clamer son indignation et sa colère face aux oppresseurs nazis et à leurs complices de Vichy. »

Dès lors, pas un numéro ne paraît sans que soient rappelées ces exécutions. Le numéro 147 du 23 janvier 1942 publie des extraits de la dernière lettre de Gabriel Péri, en même temps qu'est lancée une campagne d'adhésion intitulée « Promotion Péri-Sampaix ». De même, de nombreux tracts voient le jour[25]. Sujette à controverse, la mort de Gabriel Péri, plus de soixante-dix ans après, suscite encore des passions. Laisser la parole à celui qui a reçu tant d'hommages posthumes est sans doute un moyen de faire comprendre, par sa rectitude, l'ampleur de l'homme :

« Que mes amis sachent que je suis resté fidèle à l'idéal de ma vie ; que mes compatriotes sachent que je vais mourir pour que vive la France. Je fais une dernière fois mon examen de conscience. [...] J'irais dans la même voie si j'avais à recommencer ma vie. Je crois toujours en cette nuit que mon cher Paul Vaillant-Couturier avait raison de dire que le communisme est la jeunesse du monde et qu'il prépare des "lendemains qui chantent". Je vais préparer tout-à-l'heure des lendemains qui chantent. »

 

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Légende de Gabriel Péri

 

 

C'est au cimetière d'Ivry

Qu'au fond de la fosse commune

Dans 1'anonyme nuit sans lune

Repose Gabriel Péri

 

Pourtant le martyr dans sa tombe

Trouble encore ses assassins

Miracle se peut aux lieux saints

Où les larmes du peuple tombent

 

Dans le cimetière d'Ivry

Ils croyaient sous d'autres victimes

Le crime conjurant le crime

Etouffer Gabriel Péri

 

Le bourreau se sent malhabile

Devant une trace de sang

Pour en écarter les passants

Ils ont mis des gardes-mobiles

 

Dans le cimetière d'Ivry

La douleur viendra les mains vides

Ainsi nos maîtres en décident

Par peur de Gabriel Péri

 

L'ombre est toujours accusatrice

Où dorment des morts fabuleux

Ici des hortensias bleus

Inexplicablement fleurissent

 

Dans le cimetière d'Ivry

Dont on a beau fermer les portes

Quelqu'un chaque nuit les apporte

Et fleurit Gabriel Péri

 

Un peu de ciel sur le silence

Le soleil est beau quand il pleut

Le souvenir a les yeux bleus

A qui mourut par violence

 

Dans le cimetière d'Ivry

Les bouquets lourds de nos malheurs

Ont les plus légères couleurs

Pour plaire à Gabriel Péri

 

Ah dans leurs pétales renaissent

Le pays clair où il est né

Et la mer Méditerranée

Et le Toulon de sa jeunesse

 

Dans le cimetière d'Ivry

Les bouquets disent cet amour

Engendré dans le petit jour

Où périt Gabriel Péri

 

Redoutez les morts exemplaires

Tyrants qui massacrez en vain

Elles sont un terrible vin

Pour un peuple et pour sa colère

 

Dans le cimetière d'Ivry

Quoi qu'on fasse et quoi qu'on efface

Le vent qui passe aux gens qui passent

Dit un nom Gabriel Péri

 

Vous souvient-il ô fusilleurs

Comme il chantait dans le matin

Allez c'est un feu mal éteint

Il couve ici mais brûle ailleurs

 

Dans le cimetière d'Ivry

Il chante encore il chante encore

Il y aura d'autres aurores

Et d'autres Gabriel Péri

 

La lumière aujourd'ui comme hier

C'est qui la porte que l'on tue

Et les porteurs se subtituent

Mais rien n'altère la lumière

 

Dans le cimetière d'Ivry

Sous la terre d'indifférence

Il bat encore pour la France

Le cœur de Gabriel Péri

 

Louis ARAGON décembre 1943

 

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Ce poème, écrit pour le deuxième anniversaire de la mort de Gabriel Péri (décembre 1941), publié illégalement, relève vraiment de la légende et non de l'histoire: en effet, ce n'est à Ivry mais à Suresnes et dans une tombe enregistrée et non pas dans la fosse communeque Gabriel Péri est enterré.

L'auteur, alors dans l'illégalité, n'a pourtant pas inventé les détails, ni l'histoire, peut-être controversée, des hortensias bleus; mais déjà la tradition orale avait porté jusqu'à lui moins de deux ans après la mort deu martyr cette vesion déformée par quoi naît une légende aujourd'hui comme au temps de la Chanson de Roland, des Troubadours et des poèmes transmis de bouche en bouche à travers une France alors comme aujourd'hui dévastée et livrée aux soudards et aux chimères...

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  • Souvent, la plume a remplacé l'épée! Dans de nombreux pays, des vers chantés ou non ont soulevé des foules! Dans l'ombre parfois, les poèmes furent et sont encore une manière de résister à l'occupation, à la répression à toutes les formes d'oppression.
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